Haut Potentiel Intellectuel (HPI) : qu’est-ce que c’est ? Caractéristiques et symptômes

Etude et compréhension de la douance

Paul CTD
25 min readNov 2, 2020

Une personne à haut potentiel intellectuel (ou une personne HPI, un surdoué ou un zèbre), est un individu qui présente une capacité intellectuelle au-dessus de la moyenne. Généralement, on prend la limite de 130 points de QI (quotient intellectuel) comme étant le palier à partir de laquelle une personne est dite à haut potentiel. Malgré cela, un débat existe entre psychologues. En effet, le quotient intellectuel ne mesure pas directement l’intelligence. Il ne permettrait donc pas de définir avec certitude si une personne est oui ou non un HPI. Pour se faire une idée de sa potentielle douance, je vous invite donc à prendre également en compte les caractéristiques propres aux comportements d’un haut potentiel, et non pas uniquement un score de QI. Nous reviendrons sur ces points par la suite.

Définition : c’est quoi un HPI ?

Comme expliqué ci-dessus, un HPI est un individu qui a une aptitude intellectuelle supérieure à la moyenne. D’un point de vue purement biologique, certaines études tendent à montrer que cette aptitude supérieure viendrait de (1) un nombre plus important de neurones et (2) d’une manière différente pour le cerveau de traiter l’information. En gros, je pense que le message clef à retenir c’est qu’un haut potentiel n’est pas un individu « plus intelligent ». C’est surtout un individu qui fonctionne différemment.

Même si, dit comme ça, tout à l’air d’être plutôt un bonne chose, sachez que le haut potentiel vit souvent très mal sa douance. Voici par exemple quelques chiffres tirés de cette étude :

  • Environ 20% des HPI n’atteignent pas le niveau Bac ;
  • Un tiers vont redoubler au moins une classe ;
  • Des rapports conflictuels avec les enseignants provoquent une chute des résultats scolaires chez 80% des surdoués ;
  • Deux tiers sont considérés comme médiocres car ils n’arrivent pas à s’intégrer et se faire au système scolaire actuel ;
  • Avant l’âge de 12 ans, près de 10% vont parler de suicide ou faire une tentative.

Définition neurologique et biologique

Jean-Claude Grubar, professeur de psychologie expérimentale, explique que les personne surdouées ont un traitement de l’information différent des autres. Cela serait dû, selon lui, à la présence d’une mémoire de travail plus efficace que chez les personnes « normales ». La mémoire de travail peut être apparentée à la mémoire à court terme. Elle permet de garder accessibles des informations qui vont nous permettre de résoudre un problème en les mettant en relation avec d’autres informations. Chez un HPI, cette mémoire est plus performante. Il (elle) peut donc utiliser plus de données et plus longtemps pour résoudre un problème.

On pourrait comparer le cerveau à un ordinateur par exemple. Un de ces ordinateurs a une grande mémoire vive, et il peut donc exécuter plein de tâches en même temps. L’autre ordinateur a une mémoire vive plus réduite, et il est donc régulièrement obligé d’éteindre un logiciel pour pouvoir ouvrir un autre. Il ne peut pas tout utiliser en même temps et doit régulièrement faire des aller-retours entre les deux. Très concrètement, durant mes études, j’ai toujours été très bon dans les épreuves de synthèses de dossiers, et j’adorais ça ! En fait, j’aimais faire de la gymnastique mentale entre différents documents qui avaient un petit point commun pour en tirer une idée / solution / synthèse.

Par ailleurs, des chercheurs de l’Université McGill, à Montréal, et de l’institut américain de la santé mentale (NIMH) , à Washington, ont réalisé une étude sur les cerveaux 300 jeunes. Ils en déduisent que la différence entre un cerveau surdoué et un cerveau normal viendrait du fait que le cortex préfrontal — ou la partie pensante du cerveau, au niveau du front — se développe plus rapidement que chez les autres. En fait, elle grossit plus rapidement au début, puis s’amincit durant l’adolescence.

Le vocabulaire autour de la douance

HPI, surdoués, zèbres, atypiques, etc. Comment faire pour s’y retrouver ? Eh bien sachez que tous ces mots décrivent la même personne. Vous pouvez donc utiliser celui que vous préférez ! Personnellement, j’aime bien haut potentiel car je trouve qu’il ne renvoie pas à une notion d’intelligence ou de supériorité réelle et exercée, mais bien à sa potentialité. De plus, on peut le décliner en haut potentiel intellectuel (HPI), haut potentiel émotionnel (HPE)… Ces variations me semblent apporter également plus de profondeur à ces personnalités différentes. Du moins, plus que le mot « surdoué » qui veut uniquement dire « plus doué(e) que quelqu’un d’autre ».

Dans tous les cas, voici quelques mots que vous croiserez certainement au cours de vos recherches ainsi que sur ce site :

  • Surdoué : probablement le mot que j’aime le moins. Il renvoie trop une image de facilité et de supériorité. Si mon camarade est surdoué, alors la vie sera plus facile pour lui. Or, rien n’est simple ou évident dans la tête d’un haut potentiel.
  • Enfant Intellectuellement Précoce (EIP) : déjà, ce phénomène ne se limite pas qu’aux enfants, donc c’est un premier problème. Ensuite, parler de précocité m’ennuie car (1) tous les hauts potentiels ne sont pas précoces et (2) cela peut donner l’idée que le HP va découvrir les choses en avance. Il serait donc possible pour une personne lambda de rattraper ce retard peu à peu. Or, il s’agit vraiment d’un fonctionnement différent, et non pas d’une avance dans une course.
  • Atypique : oui, pourquoi pas. Mais c’est trop vague. Un enfant peut être atypique car il s’intéresse à quelque chose d’improbable, cela n’en fait pas un haut potentiel pour autant.
  • Zèbre : c’est un terme qui a été proposé par Jeanne Siaud-Facchin (psychologue) pour trouver un mot qui diffère de tous ceux proposés ci-dessus (et souvent très connotés, vous en conviendrez). Son idée, c’est qu’un zèbre (HP) se fond dans le paysage de la savane (le monde), mais reste différent d’un cheval (personne « normale »). De plus, les zèbres se reconnaissent entre eux via leurs rayures (c’est vrai !), et son souvent difficiles à domestiquer (parlez-nous d’autorité, vous verrez).
  • Laminaire et complexe : il s’agit en fait de deux sous-ensembles. Un HP laminaire est une personne qui a obtenu un score globalement homogène dans toutes les sections de son test de QI, alors qu’un individu complexe aura surperformé dans une catégorie (j’y reviens après). Je n’aime pas trop ces dénominations car elles imposent la réalisation d’un test de QI qui n’est, selon moi, pas totalement fiable.

Caractéristiques et « symptômes » du haut potentiel intellectuel

Vous trouverez certainement beaucoup de tests sur internet qui vous diront si oui ou non vous êtes un(e) HP. J’ai du mal à croire que remplir un questionnaire en ligne permette de le définir, mais rien ne vous empêche d’aller y faire un tour. Néanmoins, voici selon moi quelques traits de personnalité qui devraient vous mettre la puce à l’oreille :

  • L’hypersensibilité, dont je reparlerai juste après, car cela mérite une partie entière ! En tout cas, sachez que les hauts potentiels sont généralement de vraies éponges émotionnelles, à tel point qu’elles se ferment complètement aux autres pour se sentir moins agressées à longueur de journée. Je sais de quoi je parle, j’ai les sentiments en folie, mais je peux parfois ressembler à une vraie tombe insensible.
  • Un décalage social, généralement dû au fait que le HP ne s’intéresse pas aux mêmes choses que ses camarades. Lorsque j’étais en primaire, mes copains voulaient toujours aller jouer dehors aux aventuriers ou sauter dans la piscine. De mon côté, j’étais plutôt intéressé par le fait de créer des concours sur internet pour gagner de l’argent via l’envoi de SMS payants pour pouvoir économiser et m’acheter, plus tard, la même maison que celle des X-Men. Je ne pense pas qu’une activité soit mieux que l’autre ; je pense juste que j’avais déjà envie de mettre un pied dans le « vrai » monde et que j’étais particulièrement sensible au charme des maisons — et j’en voulais une !
  • Une créativité et curiosité sans limite : si vous aimez à peu près tout, et que vous avez envie de changer de voie professionnelle à chaque nouvelle idée, vous y êtes.
  • Vous ressentez un profond besoin de justice (et ce dans tous les domaines).

Je me permets encore une fois sur ce site de rappeler l’importance de déceler le potentiel et les caractéristiques des enfants intellectuellement précoces. Ils ont un fonctionnement intellectuel différent et y poser le bon diagnostique est primordial pour aider à s’épanouir l’enfant doué et futur adulte surdoué.

Le test de QI

Il existe deux approches pour identifier un haut potentiel intellectuel. La première (et dont on va parler ici) est une approche dite algorithmique : le test de QI (avec des chiffres quoi) qui est un test de mesure psychométrique et de fonctionnement cognitif. La seconde est une approche clinique. Elle est selon moi plus qualitative (car il ne s’agit pas d’un simple score, mais plutôt d’un tout). Cependant, elle peut vite être biaisée par un a priori et l’expérience du praticien. Aujourd’hui, les grandes théories expliquent qu’il est préférable de cumuler les deux approches pour avoir un résultat plus fiable (car oui, un test de QI n’est pas sûr à 100%). Cependant, dans la pratique, un seul est souvent pris.

Le quotient intellectuel (QI) moyen humain étant à 100, on estime qu’un HPI a un QI supérieur ou égal à 130 sur l’échelle de Wechsler (ou 145 sur l’échelle de Cattell). Cela représente environ 2,5% de la population.

Les différents tests de QI

Il existe de nombreux tests de QI différents. Néanmoins, sachez que le plus fréquemment utilisé est le WAIS 4 (la 4ème version du Wechsler Adult Intelligence Scale). Une 5ème version est en cours de conception. Ce test s’articule autour de 4 notes :

  1. La compréhension verbale : la capacité à comprendre, raisonner et s’exprimer avec des mots. C’est via ce sous-test que vous obtenez une note de QI verbal.
  2. Le raisonnement perceptif : il s’agit de votre « raisonnement visuel ». Pour caricaturer, c’est la faculté à réaliser un puzzle compliqué.
  3. La mémoire de travail : vérification de la « puissance » de la mémoire à court terme.
  4. La vitesse de traitement.

Ces 4 notes vont de 1 à 19 (un haut potentiel se situe généralement à partir de 14). Si les 4 scores sont homogènes, c’est ce que l’on appelle un surdoué laminaire. Si ce n’est pas le cas, on dit qu’il est complexe. On parle aussi de résultats homongènes ou de résultats hétérogènes.

Je reste assez sceptique quant à l’exactitude de ces tests (pas seulement le WAIS 4). En effet, vous n’obtiendrez pas les mêmes résultats en fonction de l’état dans lequel vous le passez. Si vous êtes stressé(e), il est possible que vous obteniez un résultat plus bas. Mais du coup, comment savoir à quel moment on l’a passé dans de bonnes conditions ? De plus, comptez 200 à 300€ pour le réaliser (trop cher à mon goût pour recevoir une potentielle fausse note).

Où passer un test de QI ?

Le test de QI se déroule chez un psychologue, en plusieurs séances (d’où le prix). Ce qui m’embête aussi, c’est le fait que les résultats sont interprétés par le psychologue pour donner le score final. Oui oui, interprétés. Donc en fonction de la familiarisation du psychologue avec un haut potentiel, le résultat du test peut également différer.

Bref, je trouve qu’il y a trop de variables qui pourraient influer sur le score final dans un test de QI classique. Malgré tout, certains auront besoin d’« en être sûr » et de mettre un chiffre sur ce qu’ils ressentent. Si cela vous permet de vous sentir plus à l’aise avec vous-même, alors foncez. Passer un test vous fera du bien. Il ne s’agit là que de mon avis, et c’est d’ailleurs pourquoi je ne parlerai pas sur ce site du résultat de mon test. Qu’il soit de 125, 132 ou 150, cela ne regarde que moi. L’important ici, c’est plutôt la gestion de tout ce qu’il se passe autour de cette douance, et non pas la compétition autour d’un chiffre. Je ne pense pas que jouer à qui a la plus grosse soit utile chez les hauts potentiels.

Dans tous les cas, sachez que tester le potentiel est à envisager lorsque l’enfant précoce (ou du moins l’enfant avec des aptitudes intellectuelles et/ou une maturité intellectuelle avérée) ou l’adolescent signale un ennui à l’école ou des difficultés scolaires et troubles d’apprentissage. De plus, un sentiment de décalage peut être présent. Le plus important reste d’être attentif à une éventuelle intelligence hors du commun ou à l’apparition des troubles dys (dyslexie, dyspraxie, etc.) car les repérer précocement permet de mieux comprendre le potentiel et aide les enfants à s’épanouir.

Le cerveau hyperactif

Les personnes à haut potentiel intellectuel ont donc un fonctionnement cérébral différent. De nos jours, même si les études sur le sujet restent encore peu nombreuses, il n’en demeure pas moins qu’elles tendent toutes vers une seule et même direction : le zèbre a un cerveau sous stéroïdes.

Le fonctionnement différent de la pensée

Tout d’abord, intéressons-nous à la pensée, ou du moins à la façon dont elle se forme.

La pensée arborescente

Dans un cerveau « normal » (on peut également utiliser le terme « neurotypique », mais je ne l’aime pas trop), la pensée est dite linéaire. En fait, une idée en amène une autre, et ainsi de suite. Le cheminement est plutôt simple à suivre, et globalement logique. Du côté d’un surdoué, la pensée va être arborescente (on utilise parfois aussi le terme intuitif). Le principe, c’est qu’une idée va faire penser à 2 ou 3 autres idées, qui vont chacune faire penser à plusieurs autres, etc. Il s’agit là d’un véritable réseau d’associations d’idées.

Des psychologues ont réalisé un test sur des jeunes enfants. Ils les ont divisés en deux groupes. Le premier était constitué d’élèves « normaux », et le second de petits zèbres. On leur a donné une phrase, et ils devaient citer tout ce qui leur passait par la tête. Je vous invite à regarder la vidéo des résultats juste en dessous (c’est à partir de 17 minutes 50). Cela illustre très clairement cette pensée arborescente, dans laquelle chaque idée en amène plusieurs autres.

Il me semble intéressant de noter que l’association des idées ne se fait pas forcément de manière logique, ou du moins qu’elle n’est pas comprise par tous. De mon côté, je fais parfois des liens entre une idée A et B qui peuvent être incompréhensibles pour certains. Et, même si je reste convaincu que cette association est logique, j’ai parfois du mal à la justifier car les idées peuvent aller très (trop ?) vite dans ma tête pour que je puisse retracer le chemin. L’autre jour par exemple, j’ai fait un parallèle entre une cerise et un iPhone d’un coup, sans savoir d’où c’était sorti. En fait, j’avais associé rapidement des choses que je savais d’avant. Lorsque Apple a cherché son logo actuel, ils pensaient au début ne pas faire une version « croquée » de la pomme, mais voulaient la faire pleine. Un graphiste leur a fait remarquer (à juste titre) que cette pomme pouvait être confondue avec une cerise. Ils ont donc décidé d’ajouter un croc dans la pomme, pour lui donner une échelle. Le lien entre la marque Apple et l’iPhone est ensuite facile. Mais voilà comment une cerise m’a fait penser à un iPhone sans que je ne comprenne pourquoi.

Un raisonnement inhabituel

En suite logique du point précédent, cette pensée arborescente qui fonctionne H24 en fond provoque un raisonnement qui n’est pas forcément compris (par nous comme par les autres). L’exemple de la cerise et de l’iPhone parle de lui-même. On a emmagasiné beaucoup d’information tout au long de notre vie, que l’on peut assez facilement ressortir sans vraiment savoir pourquoi ni comment.

L’exemple qui ressort souvent est celui des mathématiques. Il est tout à fait fréquent que, à l’école, on connaisse la réponse d’un problème de mathématique sans pour autant savoir comment est-ce que l’on a trouvé cette réponse. Ça m’est arrivé quelques fois. Je pense que c’est dû au fait que j’ai toujours été très à l’aise avec les nombres. Enfant, j’adorais les multiplier par deux dans ma tête pour arriver à des résultats de plus en plus vertigineux (1, 2, 4, 8, 16, 32, 64, 128, etc.). En avançant dans mes études, j’ai continué ce principe avec d’autres calculs. Le résultat, c’est que je connaissais par cœur les réponses de certaines opérations. La réponse finale apparaît donc un peu automatiquement dans ma tête. Et je pense que ces opérations (que j’avais apprises) étaient des résultats intermédiaires des exercices que l’on me demandait.

Pour certains, les tables de multiplication ont été apprises par cœur. Ils connaissent donc les résultats plus ou moins automatiquement, et n’ont pas besoin de refaire le calcul dans leur tête. Eh bien c’est la même idée, mais avec des calculs un peu plus improbables. Le calcul se fait donc avec la mémoire à long terme, et non la mémoire à court terme.

Une interprétation du sens des mots et des implicites

Pour un surdoué, chaque mot a une valeur et une définition précise (son sens littéral), et il est donc différent d’un autre. Il est donc très important de bien les peser pour être le plus précis possible dans ce que l’on dit. Je vais vous donner un exemple qui m’arrive souvent. Un ami m’envoie par message « Tu fais quelque chose ce soir ? ». Est-ce que :

  • Il veut juste savoir ce que je fais ce soir, sans arrière-pensée ?
  • Il veut me proposer que l’on aille faire quelque chose ensemble ?
  • Comment ça « est ce que je fais quelque chose» ? Évidemment ! Je ne peux pas ne rien faire. Je peux rester chez moi, mais est-ce ne rien faire ? Non, je risque de lire ou regarder un film, et ça c’est faire quelque chose. Donc est-ce que je réponds juste « Oui » parce que je vais obligatoirement faire quelque chose ?
  • Si j’ai déjà prévu quelque chose, est-ce qu’il veut que je lui propose de venir ?

Bref, je reste généralement un peu perplexe et j’ai appris peu à peu que la question implicite est de savoir si je suis intéressé pour faire une sortie ensemble. Mais si c’est ça la vraie question, pourquoi ne pas la poser directement ?

Utilisation totale du cerveau

Je me permets de faire un petit rappel sur les deux hémisphères du cerveau. Nous avons d’un côté l’hémisphère gauche, qui est plutôt dédié à l’analyse, le langage, la construction des mots, le raisonnement, etc. De l’autre côté, c’est l’hémisphère droit qui lui est plutôt dédié au traitement visuel, la créativité et l’intuition. Le système scolaire actuel (et je pense globalement toute la vie) a tendance à favoriser l’utilisation de l’hémisphère gauche. À l’école, on nous apprend plus à raisonner, comprendre et apprendre qu’à être intuitif. D’ailleurs, l’expression « faire marcher son cerveau » ne semble s’adresser qu’à l’hémisphère gauche.

Pour les hauts potentiels intellectuels, il semblerait que l’hémisphère droit soit autant utilisé que l’hémisphère gauche. On parle d’équipotentialité des hémisphères. Les phrases peuvent se construire aussi bien à droite qu’à gauche. C’est également pour ça qu’une suite d’idées n’est pas logique pour tout le monde, car elle n’a pas été nécessairement faite par la partie « logique » du cerveau. Les mots (à gauche) deviennent des images (à droite). Prenons l’image ci-dessous par exemple. Arrivez-vous à trouver quel est le mot écrit ? Vous trouverez la réponse en bas de cet article. Il s’agit d’un exemple possible de la transformation en image d’un mot.

C’est un peu comme un ordinateur dans lequel chaque document (donc chaque idée) serait classé selon plusieurs facteurs. Pour un ordinateur lambda on ne peut retrouver les informations que par ordre alphabétique (pensée linéaire), alors que sur un ordinateur différent on peut classer les documents alphabétiquement, par couleur, par thème, etc. Ainsi, il est possible de faire des liens supplémentaires (et incompréhensibles pour le premier ordinateur) entre les documents.

Lors d’une récente étude (2016) des chercheurs ont fait passer une IRM à des HPI complexes et laminaires. La vidéo ci-dessous explique leurs résultats. Comme dit précédemment, je ne suis pas forcément pour cette différenciation (laminaire vs complexe). Néanmoins, leur recherche a le mérite de venir conforter le fait que les hauts potentiels utilisent des parties différentes de leur cerveau.

Enfin, le corps calleux (la partie qui sépare les deux hémisphères) serait plus robuste et plus dense chez un haut potentiel. C’est cela qui permettrait de faire des liaisons plus fortes et plus rapides entre les deux hémisphères.

Particularité de la mémoire

La mémoire de long terme semble plus développée chez un haut potentiel. Ou plutôt, le HPI va mémoriser sans effort. Le contrepied, c’est qu’à force de s’habituer à tout mémoriser sans effort, il est très dur d’apprendre quelque chose par cœur lorsque l’on n’en a pas vraiment envie. Cela peut d’ailleurs engendrer des problèmes scolaires quand, en grandissant, le haut potentiel ne peut pas juste se reposer sur ses acquis et doit commencer à travailler.

Je pense que le vrai problème est qu’il s’agit d’une mémoire très sélective. Il faut que je sois intéressé par ce que j’apprends. Comme je suis très curieux, cela ne pose généralement pas de problème et je mémorise assez facilement. Néanmoins, il peut arriver que certaines informations ne s’impriment pas du tout. J’ai beau tout faire, je ne retiens rien. Ou alors, je rejoins l’idée précédente dans le fait que je ne sais juste pas apprendre. Ça se fait tout seul lorsque j’aime ce que je fais, sinon ça ne se fait pas du tout. Très sincèrement, je n’en ai aucune idée.

Par exemple, je peux mémoriser très facilement une liste de courses de choses pour moi, mais si ma mère me demande de rajouter quelque chose pour elle vous pouvez être sûrs que je vais l’oublier. Ou alors, apprendre un numéro de téléphone de quelqu’un pour qui j’ai de l’intérêt se fait pratiquement automatiquement. En revanche, retenir le numéro du service client EDF m’est impossible, même si j’ai besoin de le faire régulièrement et que ça peut m’être utile. Ça ne m’intéresse tout simplement pas. Le videur à l’entrée de mon cerveau / discothèque lui a refusé l’entrée car il n’est pas intéressant (et c’est non négociable).

L’hypersensibilité

Le haut potentiel intellectuel fonctionne beaucoup avec son cerveau, on vient de le voir. Cependant, l’affectif a également une grande place pour elle. En effet, les surdoués sont des personnes émotionnelles. On dit d’ailleurs que ce potentiel émotionnel la fait fonctionner comme une personne hypersensible : elle a une sensibilité accrue. C’est, je pense, le trait de caractère qui me définirait le plus. Il s’agit dans un premier temps d’une hypersensibilité émotionnelle (un rien me met dans tous mes états), mais également d’une hypersensibilité sensorielle : l’hyperesthésie. Ce combo gagnant m’a régulièrement fait me sentir anxieux ou en décalage avec les autres.

5 sens en fonctionnement : hypersensibilité sensorielle

Je vais commencer par parler de l’hypersensibilité des 5 sens, que l’on appelle hyperesthésie. Pour faire simple, l’hyperesthésie c’est le fait de tout ressentir de manière plus forte que la moyenne. Une odeur va être plus prononcée, un goût plus intense, un bruit plus assourdissant, une lumière plus éblouissante, etc. Vous voyez l’idée. Jusque-là, vous allez me dire que ça peut être plutôt pratique, ou du moins intéressant. Le seul « problème », c’est que le HPI a aussi un déficit d’inhibition latente. C’est un mot compliqué pour expliquer quelque chose de simple. L’inhibition latente est le fait pour le cerveau de faire le tri parmi toutes les informations qu’il reçoit pour ne garder que celles qui sont pertinentes. Si on prend l’exemple ci-dessous d’un élève en cours, un « neurotypique » ne fera attention qu’aux éléments colorés. Ce sont ceux qui, pour lui, doivent être utilisés.

Sauf que le petit zèbre a un déficit de cette inhibition latente. En gros, son cerveau n’arrive pas à trier les informations pertinentes ou non. Et souvenez-vous, il a également des sens plus aiguisés. Si on reprend le même schéma de la salle de classe, voici ce qu’un haut potentiel retiendrait.

C’est ce phénomène, associé à la pensée arborescente, qui provoque un effet de surchauffe du cerveau. Voilà donc typiquement pourquoi un petit zèbre et enfant surdoué aura du mal à se concentrer en cours et pourquoi on lui expliquera durant toute sa scolarité que c’est un mauvais élève. Le problème en fait, c’est que cet enfant à haut potentiel n’arrive simplement pas à faire le tri pour trouver la bonne information à prioriser. Cette difficulté est souvent identifiée — à tord — comme un TDAH (Trouble de Déficit de l’Attention / Hyper-activité). De plus, le système scolaire n’est pas du tout adapté à des élèves précoces. Mais être surdoué ne rime pas nécessairement avec échec scolaire. Certains s’y font très bien, avec réussite scolaire et saut de classe à l’appui.

Des fois j’ai juste envie que mon cerveau se mette en pause. Typiquement si je marche dans la rue, je fais attention à chaque personne, chaque voiture, chaque chose autour de moi. Pour une raison que j’ignore, je vois leurs déplacements un peu à la manière d’un vecteur, et pour chacune des trajectoires j’imagine une bonne centaines de possibilités. Ou alors dans un restaurant, j’ai du mal à rester concentré sur la discussion des amis à ma table, parce que je ne peux pas m’empêcher de suivre celles des tables à côté et de prévoir des scénarios sur la façon dont leur discussion va avancer. Je suis attentif à chaque bruit de porte, chaque commande, chaque odeur me fait penser à un plat et je cherche à savoir pour qui il est, etc. Honnêtement, c’est une vraie galère.

Hypersensibilité émotionnelle

Le haut potentiel intellectuel n’a qu’un seul but dans la vie : être aimé. Il fonctionne à l’affecte. Tout n’est qu’émotions. Et comme on vient de le voir, il fait attention aux moindres détails. Cette hypersensibilité émotionnelle combinée à un flux constant et important d’informations qui arrivent au cerveau provoquent des sautes d’humeur.

La gestion des sentiments

Je peux passer de la joie à la tristesse en une fraction de secondes, juste avec un mot que je juge de travers (alors que pour d’autres il ne l’est pas du tout). Mais surtout, je ne suis jamais un peu content, un peu triste, ou un peu en colère. C’est plutôt un bonheur incroyable, une dépression intense ou une haine terrible. Et ces changements peuvent vraiment opérer en une fraction de secondes, sans que je ne contrôle quoi que ce soit. Le pire est parfois même le fait que je ne sais pas d’où vient ce sentiment. Tout se passe tellement vite là-haut que je ne comprends pas la raison de mon état. Et cela se passe depuis toujours, de manière extrêmement précoce.

Voici un exemple très récent. Je devais louer une voiture pour aller en vacances. J’avais prévu de la prendre la veille de notre départ, pour pouvoir partir tôt le lendemain matin et ainsi éviter les bouchons. Le rendez-vous était initialement prévu à 17h avec l’agence, mais ils ont eu un problème et ont dû tout décaler pour 20h. Et là : panique à bord. J’étais presque en larmes en train de faire une crise d’angoisse. La raison ? J’avais tout organisé dans ma fin d’après-midi et soirée, et ce changement d’heure allait tout bouleverser. Donc je n’allais pas avoir le temps de tout faire, donc je ne pourrai pas partir comme je le souhaitais le lendemain matin, donc mes vacances allaient être ratées, donc mon copain (avec qui je partais) allait m’en vouloir, donc il n’allait plus m’aimer, donc personne n’allait m’aimer. Tout ça pour un simple changement d’heure. Spoiler alert : j’ai finalement réussi à tout réorganiser dans ma soirée, nous sommes partis à l’heure le lendemain matin et tout s’est très bien passé (sans surprise).

Ce que j’essaye de dire, c’est que même si ces sentiments sont complètement « déraisonnables », ils sont quand même là. Ça peut être très fatigant au quotidien, mais c’est je pense une très belle chose. La vie est plus intense, et permet je pense d’avoir plus de créativité pour les hauts potentiels émotionnels.

Surdose de stress et d’anxiété

La pensée arborescente combinée à l’hypersensibilité a tendance à générer une quantité énorme de stress et d’anxiété. Je suis littéralement stressé et anxieux pour tout. À force d’imaginer tous les scénarios possibles sur chacune de mes actions, je vois l’ensemble des routes qui pourraient amener à un échec. Une aide potentielle serait parfois la bienvenue. De plus, ma dépendance affective envers les objets fait que je suis anxieux rien qu’à l’idée qu’ils ne fonctionnent plus. Par exemple, je suis triste lorsque j’ai trop taillé un crayon et qu’il devient donc trop petit pour être utilisé. Du coup, j’ai tendance à ne pas les utiliser jusqu’au bout. Mais cela amène un autre problème : je suis morose parce qu’ils doivent se sentir seuls (c’est triste pour un crayon de rester dans un pot non ?). Au final, je finis par stresser lorsque je tiens un crayon dans la main parce que je sais que cela va aboutir à un de ces deux scénarios. Vous voyez l’idée ? Et ça, ce n’est que pour un crayon. À l’heure où j’écris ces lignes, je suis en train de réfléchir à un éventuel investissement immobilier. Je ne vous raconte même pas l’état de stress constant dans lequel je suis.

La compréhension de l’environnement : l’extra-lucidité

Le haut potentiel intellectuel est une véritable éponge émotionnelle. Il capte et analyse les moindres changements émotifs des personnes de son entourage, sans le vouloir. Ensuite, grâce à son hypersensibilité, il les intègre et finit par les ressentir lui-même. Au début, lorsque ma psychologue me parlait de tout ça, j’avais du mal à saisir cette idée de ressentir une émotion ou une ambiance sans pour autant la comprendre ou y mettre de mots. Elle appelait ça le 6ème sens des surdoués. Elle m’a donc donné un exemple tout simple, que je me permets de vous faire passer. Si une personne se balade avec son chien, et se dispute avec une autre personne dans la rue, le chien va pratiquement tout le temps se mettre à aboyer contre l’inconnu(e). Alors comment est-ce que le chien a fait pour comprendre qu’il y avait un problème dans la situation ? Il a fait preuve d’empathie. L’animal a perçu un changement dans la respiration de son maître, dans sa gestuelle, dans son ton de voix et certainement d’autres facteurs qui font qu’il a réalisé que la situation était mauvaise. Il s’est lui aussi senti menacé, et a aboyé contre « l’agresseur ». C’est la même chose pour un zèbre. Il perçoit des changements chez l’autre, les intègre et les ressent sans savoir pourquoi.

Depuis tout petit, le surdoué est donc parfaitement lucide sur le monde qui l’entoure. Il ne vit pas une enfance toute rose comme beaucoup, mais à conscience des limites de ses parents, de ses professeurs, de la société et autres. On parle d’extra-lucidité. Cette compréhension précoce du monde qui l’entoure influence la construction de son identité.

Construction de l’identité

Comme expliqué juste au-dessus, le petit zèbre s’est toujours senti en décalage avec ses camarades. Il a conscience de choses que les autres ne soupçonnent pas. Le haut potentiel intellectuel vit sa jeunesse différemment. Il a du mal à comprendre les codes sociaux qui régissent sa vie, car ils ne lui ressemblent pas. Sauf que souvenez-vous, le zèbre a un besoin constant d’être aimé, et c’est ce qu’il recherche. Il va donc se construire ce que l’on appelle un faux-self.

Le faux-self, c’est sa personnalité (fausse) qui protège son vrai-self (ce qu’il est vraiment). Le zèbre utilise son faux-self pour s’intégrer au mieux et faire comme si tout allait bien. Son vrai-self reste alors bien rangé au fond de lui, par peur de provoquer une réaction trop extravagante pour les autres qui le conduirait à un rejet. Tout le monde a cette relation vrai / faux-self. Le mieux serait d’arriver à ce que le faux-self guide le vrai-self à travers la société, tout en laissant le vrai-self s’exprimer dès qu’il en a envie. Un peu comme un cadre, mais qui laisserait l’artiste se faire plaisir. Dans le cas d’un surdoué, le faux-self a tendance à prendre le dessus sur le vrai-self. Au fil du temps, la véritable personnalité peut même devenir inaccessible, et c’est un véritable danger.

Mécanismes de défense

J’ai noté trois mécanismes de défense principaux qui me servent à combattre mon hypersensibilité :

  • L’humour, et particulièrement l’humour noir. Il me permet de rire d’une situation qui m’atteint profondément. De plus, l’humour (en général) permet une meilleure acceptation au sein de la société (et comme j’ai besoin d’amour, je donne de l’humour) ;
  • La création d’un monde interne : j’ai dans ma tête pratiquement tous les scénarios de vie possible. Et mon imagination est telle que j’ai l’impression de les vivre tous. Il y a un monde entier dans mon imaginaire, qui me permet également de justifier certaines réactions d’autres individus lorsque je ne les comprends pas ;
  • La rationalisation des émotions : j’ai tendance à expliquer chaque réaction et émotion d’une façon logique, rationnelle, intellectuelle, voire limite mathématique. Cela me permet de m’en détacher un peu, et en quelque sorte de désactiver la charge émotionnelle. Le problème, c’est que j’ai fait ça pendant de nombreuses années (mon faux-self avant tendance à être trop peu sensible pour protéger mon hypersensibilité) et que j’avais parfois l’air d’être frigide et très replié sur moi-même.

Conclusion

Le haut potentiel intellectuel est une personne qui possède un QI supérieur à la moyenne. Même si l’image du surdoué qui réussit tout ce qu’il entreprend avec facilité est très répandue, la réalité est souvent toute autre. Le HPI fonctionne différemment. Il oriente sa façon de penser et d’agir autour de son ressenti et de ses sentiments exacerbés. Hypersensible par nature, il recherche constamment des relations et des interactions car il a un besoin profond d’être aimé. Son cerveau « câblé » différemment associé à ce quotient émotionnel élevé le font régulièrement se sentir en décalage par rapport à son entourage. En grandissant, il se construit une identité « publique » appelée faux-self qui lui permet de protéger son vrai-self bien trop sensible et incompris par les autres. Recroquevillé au fond de lui-même, le haut potentiel intellectuel s’oublie et se mure derrière un bouclier d’humour et d’insensibilité. Tout cela encore dans le but d’être aimé. Après détection de la douance, un accompagnement spécialisé est à privilégier pour les petits zèbres.

D’un autre côté, le HPI est généralement une personne très créative et pleine d’idées. En effet, son cerveau est inondé d’informations de par le déficit d’inhibition latente, mais également via la pensée arborescente qui tourne toujours en fond. Il aime apprendre, comprendre et découvrir. Il a besoin de donner un sens à sa vie.

Être haut potentiel intellectuel, c’est avoir des (très) hauts et des (très) bas tous les jours. C’est vivre intensément chaque instant, en cherchant parfois des moments « off », pour pouvoir mettre en pause ce cerveau hyperactif. Néanmoins, lorsqu’elle est identifiée, comprise et acceptée, cette différence peut se transformer en quelque chose de fantastique.

PS : le mot mystère était « éléphant ».

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Paul CTD

Hello ! Je suis un zèbre et j’ai décidé d’écrire au sujet de la douance :) enjoy connectthedots.fr/